L’engagement des Fondations pour la jeunesse à l’épreuve de la pandémie
Symbole de la relève générationnelle et moteur des grandes évolutions sociales, la jeunesse est souvent représentée comme le fer de lance d’une société. Ces citoyens en pleine construction constituent pourtant une frange de la population vulnérable et particulièrement exposée. Première victime du chômage ou encore de la précarité, la jeunesse est un public prioritaire autant pour l’Etat que pour les organisations philanthropiques. De nombreux fondations et fonds de dotation sont ainsi spécialisés dans la protection et l’accompagnement des jeunes. Toutefois, depuis mars 2020, les besoins des jeunes entre 15 et 28 ans se sont drastiquement accentués.
La crise de la COVID-19 a touché et touche encore durement les sociétés à travers le monde, frappant plus sévèrement encore les populations les plus fragiles. Les jeunes n’y font pas exception. Leur santé psychologique, leur capacité à mener des études, leur insertion sociale et professionnelle dans la société, ainsi que leurs possibilités d’engagement pour de grandes causes ou de découverte du monde à travers la culture ont été lourdement affectés par la pandémie. Ces aspects sont indispensables au bien-être et au développement des citoyens de demain, et ils sont menacés.
Se mobilisant et se réinventant face à cet appel à l’aide, les fondations et fonds de dotation ont par conséquent intensifié leurs efforts pour la jeunesse, refusant de l’abandonner à son sort. L’équipe du CFF est allée à leur rencontre.
L’éducation pour tous, mot d’ordre des fondations
Le bien-être moral et l’accès à l’éducation font partie des besoins les plus fondamentaux des jeunes, aussi la lutte contre le décrochage scolaire de la jeunesse est un réel leitmotiv pour certaines fondations. Il s’agit d’enjeux importants qui existent depuis de nombreuses années même si la crise de la Covid a mis en exergue certaines difficultés et inégalités.
A ce titre, Valérie Daher, directrice de la fondation Break Poverty, explique que le premier confinement a révélé une rupture numérique au sein de la population, et en particulier de la jeunesse. Certains foyers ne disposent d’aucun ordinateur, ce qui ne permet pas aux collégiens, lycéens et étudiants de suivre leurs cours. Mais ce problème était déjà présent en amont. En effet, sans connexion internet suffisante, sans ordinateur, ces jeunes ont déjà en temps normal des difficultés pour suivre, réviser et préparer leurs cours. C’est pourquoi la fondation Break Poverty, dès le premier confinement, s’est engagée sur le sujet et a offert des ordinateurs aux jeunes dans le besoin dans le cadre de l’opération “# CONNEXION D’URGENCE”. Break Poverty continue à œuvrer en ce sens au travers de nouvelles opérations comme REUSSITE CONNECTEE qui a permis de fournir des foyers en ordinateurs et d’apporter un réel soutien notamment scolaire.
Finalement, comme l’explique Nilou Soyeux, déléguée générale de la Fondation Engagement Médias pour les Jeunes, trouver sa place dans la société a été et sera toujours complexe. Il ne faut pas penser que la jeunesse est aujourd’hui en détresse psychologique du seul fait de la crise sanitaire et encore moins que ce mal être est la conséquence de la fermeture des bars et des restaurants. Supposer que la jeunesse, dont la précarité ne fait aucun doute, privilégierait de telles sorties alcoolisées à d’autres besoins primaires serait particulièrement réducteur. Les problèmes humains et, en particulier, l’incertitude planant autour de l’insertion professionnelle constituent le fond des difficultés rencontrées par la jeunesse.
De nouvelles perspectives professionnelles pour éclaircir l’avenir
Définir son projet professionnel est parfois compliqué et la crise a encore amplifié l’incertitude des jeunes quant à leur insertion professionnelle. Comme le précise Fabienne Marqueste, déléguée générale de la Fondation EY, « l’insertion professionnelle sous-entend l’aide aux populations fragilisées, qu’il s’agisse de personnes détenues, en situation de handicap, exilées, en chômage de longue durée ou encore des jeunes en grande difficulté. Et l’absence de liens sociaux combinée à la fracture numérique est une difficulté supplémentaire pour se trouver un chemin d’avenir. Délaisser la jeunesse, qui est l’avenir de la société, c’est mettre en danger notre futur commun ».
Dans la période que nous traversons c’est la société toute entière qui doit se mobiliser pour trouver des solutions. L’Etat, les citoyens, les entreprises et, évidemment, les associations qui sont en première ligne pour répondre aux besoins des jeunes et des populations vulnérables. Les Fondations se sont aussi ré-inventées pour perpétuer leur action. Ainsi, la Fondation EY qui intervient en mécénat de compétences a dû repenser la manière d’accompagner les projets et d’engager les collaborateurs d’EY à leurs côtés : émergence de besoins spécifiques en compétences, soutien à distance et difficulté à soutenir certains bénéficiaires du fait de la fracture numérique.
Parmi les 6 nouveaux projets associatifs qui seront soutenus en compétences sur le long terme. Citons Biscornu, un traiteur solidaire et anti-gaspi, qui favorise justement l’intégration professionnelle des jeunes en situation de handicap à Paris.
Fabienne Marqueste conclut en ajoutant que l’engagement humain est au cœur de toutes les actions de la Fondation EY et ceci a d’ailleurs été inscrit dans ses statuts. « Face à la crise, nous avons réaffirmé notre volonté d’être au plus près des porteurs de projet que nous accompagnons. Nous sommes des hommes et des femmes qui aidons nos concitoyens ».
L’engagement des jeunes ne faiblit pas, la philanthropie non plus
Accompagner l’engagement de la jeunesse pour la planète fait partie du rôle de la Fondation Goodplanet, explique Cédric Javanaud, directeur de la sensibilisation. Depuis 2005, la Fondation Goodplanet s’engage sur la sensibilisation des jeunes en proposant des posters pédagogiques aux écoles, en collaboration avec l’Education nationale. Au domaine de Longchamp, QG de la Fondation, celle-ci organise des animations et ateliers gratuits pour les jeunes, de la petite enfance aux études supérieures, et les associations, regroupant jusqu’à 20 000 personnes annuellement.
Ces activités ont souffert de la pandémie et des restrictions, note Cédric Javanaud, mais la Fondation Goodplanet a su se réinventer. Si la Covid-19 empêche l’ouverture du domaine au public, alors il faut pour lui « aller chercher les publics en diffusant la parole autrement ». C’est ainsi que la Fondation a digitalisé ses contenus et revu sa stratégie, en proposant par exemple des visioconférences directement dans les écoles, pour continuer à mobiliser la jeunesse.
D’ailleurs, pour Cédric Javanaud, la pandémie n’a pas fait disparaître la mobilisation de la jeunesse pour le climat. Goodplanet travaille avec de nombreux étudiants souffrant de la crise s’étant saisi du sujet climat pour mettre en place des projets durant la pandémie. « S’engager tisse de la solidarité […] en cas de coup dur – la jeunesse a ce bon sens perdu ».
Les perspectives sont assez sombres, particulièrement pour la jeunesse, plus consciente des enjeux. Il y aura des changements, mais l’avenir est encore entre nos mains. Cédric Javanaud le souligne, autant pour la jeunesse que pour les fondations, l’action est un bel outil d’amélioration de la société mais aussi de nos vies, pour une raison très simple : « Agir rend heureux ».
Si l’engagement personnel est une étape indispensable de la construction sociale des jeunes citoyens, l’accès à la culture leur permet d’élargir leurs horizons et de s’ouvrir à de nouvelles possibilités. Les restrictions sanitaires ont affecté l’accès à la culture pour les jeunes, et davantage encore pour ses praticiens.
Préserver l’accès des jeunes à la culture
Avec la fermeture des lieux culturels pendant la crise Covid-19, les étudiants en Arts voient leurs pratiques artistiques et leurs perspectives d’avenir menacées, s’ajoutant parfois à des difficultés financières.
Pour ces jeunes artistes, étudiants ou fraîchement diplômés, la Fondation de France a mis en place un fonds d’urgence sous forme de bourses. Catia Riccaboni, responsable Programmes et Fondation abritées Culture et société, explique que cette action a débuté après avoir interrogé des acteurs de l’écosystème culturel et artistique pour bien comprendre les besoins les plus prégnants. Ainsi, environ 200 jeunes, d’une moyenne d’âge de 24 ans, ont pu recevoir des bourses allant jusqu’à 1 800 €. Ce sont les établissements partenaires, comme le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris ou encore la CinéFabrique à Lyon, qui ont pu choisir, via des commissions internes, les récipiendaires. Ces bourses ont ainsi servi à financer des dépenses quotidiennes mais aussi de l’équipement artistique, des outils de communication ou encore la location d’atelier.
Cette crise a souvent conforté ces jeunes dans leur ambition de devenir artiste, et l’action menée par la Fondation de France leur a justement permis de ne pas renoncer à leur rêve pour des raisons financières. C’est le message que Catia Riccaboni souhaite faire passer aux jeunes, qu’ils n’oublient pas, malgré les grandes difficultés, « de se projeter, de rêver, d’avoir des utopies actives ». Un conseil suivi par ces jeunes artistes qui, regroupés en collectif pendant la crise, ont su se saisir de problématiques actuelles telles que l’environnement. Cet engagement pousse la Fondation de France, parmi d’autres, à mener une réflexion pour pérenniser ses actions de soutien.
Dans son programme Egalité des chances, la Fondation Culture & Diversité, quant à elle, aide les jeunes de milieux modestes à accéder aux grandes Écoles de la Culture et continue d’accompagner les admis dans leurs études. Cependant, face à la situation sanitaire, il a d’abord été nécessaire de soutenir ces jeunes, en leur apportant les conditions matérielles leur permettant de traverser plus légèrement cette période et de continuer à distance les stages du programme. C’est ainsi que des fonds d’urgence ont été mis en place lors de chaque confinement avec plus de 70 000€ de bourse versées en un an. Pour Saïd Berkane, délégué général adjoint, c’est aussi avant tout un lien humain qu’il a été essentiel de renforcer avec ces jeunes.
C’est un grand travail d’adaptation qui a dû être mené par l’équipe de la Fondation, en général habituée à être sur le terrain, au contact des jeunes. Saïd Berkane exprime le défi qui a été de maintenir ce niveau d’accompagnement malgré la distance. Toutefois, le développement de nouvelles pratiques a permis d’enrichir les anciennes. A l’avenir, des séances à distance pourront être organisées en plus de celles qui se déroulent sur le terrain.
C’est en tout cas une jeunesse inspirée et inspirante dont sont témoins Saïd Berkane et Catia Riccaboni. Ils souhaitent tous deux voir les fondations continuer de mener cet accompagnement spécifique pour les jeunes une fois la crise passée.
Un avenir prometteur pour la jeunesse grâce aux fondations
L’avenir est incertain pour la jeunesse, mais on peut toutefois l’espérer prometteur, grâce à l’engagement des fondations et fonds de dotation On remercie ici la Fondation Break poverty, la Fondation Engagement Média pour les Jeunes, la Fondation d’entreprise EY, la Fondation Goodplanet, la Fondation de France et la Fondation Culture et Diversité qui nous ont ouvert leurs portes mais c’est sans oublier tous les autres fondations et fonds de dotation qui oeuvrent chaque jour au côté de la jeunesse, et pour le bénéfice de l’intérêt général. Malgré le drame que constitue la pandémie, elle aura été l’occasion d’une belle leçon de solidarité :
Lorsqu’une population se retrouve en désespérance, les fondations et fonds de dotation se réinventent pour apporter leur soutien – en ce sens la philanthropie est ainsi un théâtre vivant et incroyablement réactif d’ “Hommes qui aident les Hommes”.